Déclarations officielles de politique étrangère - 25 juin 2020

ISRAËL/TERRITOIRES PALESTINIENS

Débat : quelle réponse de la France au projet d’annexion de la vallée du Jourdain par l’État d’Israël ? - Discours de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, en séance publique au Sénat (Paris, 24 juin 2020)

Monsieur le Président,

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,

Je suis heureux de conclure ces échanges, que j’ai trouvés utiles, denses, sur cette question majeure du conflit israélo-palestinien qui est sans doute, peut-être, devant un tournant historique, comme le rappelait tout à l’heure le président Cambon.

Début mars, à suite de la publication de la « vision » américaine, j’avais déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet devant certains d’entre vous, et vous savez, et vous avez bien voulu le rappeler, que j’y attache beaucoup d’importance.

Comme vous le savez, Benyamin Netanyahou et Benny Gantz, respectivement candidats du Likoud et de Bleu Blanc aux dernières élections législatives israéliennes, ont conclu un accord de coalition fin avril, qui a conduit à l’investiture d’un nouveau gouvernement le 17 mai dernier.

Cet accord prévoit la possibilité d’engager un processus d’annexion partielle de la Cisjordanie à partir du 1er juillet, à travers l’adoption d’une loi par la Knesset.

Si le champ géographique de l’annexion n’a pas été précisé, ni dans l’accord de coalition, ni par la suite, en tout cas aujourd’hui, deux conditions ont été posées. La première, c’est qu’Israël devra obtenir l’assentiment des États-Unis. La seconde, c’est que, d’une part, les intérêts stratégiques d’Israël devront être pris en compte et que, d’autre part, les accords de paix existants - entre autres avec l’Égypte et la Jordanie - devront être préservés.

Les États-Unis devraient se prononcer en cherchant à s’assurer d’un consensus entre le Likoud et Bleu Blanc sur le périmètre de l’annexion, et en prenant en compte les résultats du comité conjoint israélo-américain qui a été mis en place pour cartographier les frontières après la publication de la « vision » américaine. Mais la position des États-Unis fait peu de doutes, mon homologue Mike Pompeo ayant déclaré à plusieurs reprises – et pas plus tard que cet après-midi, heure française – que, de son point de vue, du point de vue américain, la décision d’annexion appartenait en dernier ressort à Israël, ce qui correspond en fait à un nihil obstat.

Avant d’évoquer en détail les conséquences préoccupantes qu’aurait l’annexion, je voudrais rappeler, certains d’entre vous l’ont déjà fait, mais autant que ce soit le ministre des affaires étrangères qui le fasse lui-même, la position de la France sur les conditions d’un règlement du conflit, j’avais déjà eu l’occasion de le dire devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Cette position repose sur trois principes, trois éléments. Un cadre : celui du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité. Un objectif : l’établissement de deux États, vivant dans la paix et la sécurité au sein de frontières sûres et reconnues, fondées sur les lignes du 4 juin 1967, avec Jérusalem pour capitale de ces deux États, étant donné qu’une solution concertée, réaliste, juste et équitable doit être trouvée sur le statut des réfugiés. Enfin, une méthode : la négociation entre les parties, et non des décisions unilatérales.

Voilà nos bases, voilà le prisme à travers lequel nous avons lu le plan proposé le 28 janvier dernier par le président américain. Et ce que nous avons constaté - et je le redis ici, avec beaucoup de force -, c’est que ce plan s’écarte du droit international, ne permettra pas la création d’un État palestinien viable et que ce plan n’est accepté que par une des parties comme base possible de négociation.

La « vision » américaine, vous l’avez dit, propose qu’Israël exerce sa souveraineté sur la vallée du Jourdain et sur toutes les colonies de Cisjordanie, et conserve l’ensemble de la ville de Jérusalem. Le projet d’annexion, que le Premier ministre Benjamin Netanyahou a endossé dans son discours d’ouverture, se propose de mettre en oeuvre cette vision de manière unilatérale et accélérée. Si cette annonce se concrétisait, ce serait- je pèse mes mots - la décision la plus grave dans le conflit israélo-palestinien depuis 1980 et la loi constitutionnelle israélienne sur Jérusalem.

L’annexion de territoires palestiniens, quel qu’en soit le périmètre, -quel qu’en soit le périmètre ! La position de la France est « quel qu’en soit le périmètre » -, remettrait donc en cause de façon grave et irrémédiable les paramètres essentiels au règlement du conflit.

Tout d’abord, l’annexion remettrait en cause le cadre du droit international.

Cela constituerait une violation, en particulier du principe fondamental de non-acquisition de territoire par la force, principe qui est au cœur de l’ordre international que nous avons bâti collectivement depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Principe que nous invoquons, par exemple, s’agissant de la Crimée. L’annexion ne serait pas non plus conforme aux résolutions prises par le Conseil de sécurité de 1967 à nos jours, que ce soit la résolution 242, que ce soit la résolution 2334, adoptée en 2016, qui appelle les États à ne pas reconnaître de changement par rapport aux frontières de 1967, sauf si elles ont été agréées par les parties, donc au terme d’une négociation.

Par ailleurs, l’annexion rendrait quasiment impossible d’atteindre l’objectif de la solution des deux États. Parce que l’annexion nous éloignerait irréversiblement de l’établissement d’un État palestinien viable, tant sur le plan politique que sur le plan économique. Sur le plan économique, les Palestiniens souffriraient de restrictions accrues d’accès aux ressources, comme l’eau. Cela a été rappelé par l’un d’entre vous tout à l’heure. Ils perdraient l’accès à certaines terres agricoles – et même à une grande partie d’entre elles si l’annexion de la vallée du Jourdain était comprise totalement dans le processus.

Du point de vue politique et géographique, l’annexion contribuerait à réduire et morceler encore davantage le territoire palestinien, ce qui remettrait en cause de manière irréversible sa contiguïté et, par là même, la viabilité d’un État palestinien souverain.

Les Palestiniens verraient parallèlement leur liberté de mouvement, déjà limitée, encore entravée, au sein même du territoire palestinien d’une part, mais également vers l’étranger, en cas d’annexion de la vallée du Jourdain.

Non seulement l’annexion rendrait irréversible la présence des colonies existantes, mais elle accélèrerait la construction de nouveaux logements dans les emprises où le droit israélien deviendrait pleinement applicable. Je rappelle les chiffres qui ont déjà été cités je crois tout à l’heure dans le débat : le nombre de colons a été multiplié par trois depuis les accords d’Oslo. Ils sont aujourd’hui 650 000, dont environ 220 000 à Jérusalem et 430 000 en Cisjordanie.

L’annexion, décision par définition unilatérale, remettrait en cause la méthode qui a été privilégiée jusqu’à présent par les deux parties et l’ensemble de la communauté internationale : celle de négociations directes entre Israéliens et Palestiniens. Les mesures unilatérales et les faits accomplis ne sont pas compatibles avec une logique de négociation. Or, seule une logique de négociation permettrait d’aboutir à une solution viable parce qu’acceptée par les deux parties. L’annexion remettrait bien sûr en cause les aspirations nationales des Palestiniens qui ont vocation à disposer d’un État viable, mais, - et je suis très heureux d’avoir entendu cette remarque à plusieurs reprises dans le débat -, l’annexion remettrait tout autant en cause le projet national des Israéliens qui est de vivre dans un État qui soit à la fois juif et démocratique. J’ai entendu Mme Prunaud, M. Cambon, M. Cazeau, reprendre cette constatation que l’on ne cite pas suffisamment. En ancrant dans le droit israélien la réalité de l’État unique, elle forcerait à terme les Israéliens à un choix impossible, entre le caractère juif de leur pays et le caractère démocratique de leur État. Ils seraient devant cette contradiction permanente et de longue durée.

Enfin, l’annexion aurait des conséquences négatives pour la stabilité régionale et la sécurité même d’Israël, à laquelle la France est extrêmement attachée et sur laquelle elle ne transigera jamais, nos amis israéliens le savent. Les relations qu’Israël entretient avec ses voisins égyptien et jordanien font partie des rares progrès enregistrés au cours de plusieurs décennies de conflit israélo-arabe. Cet acquis est fragile. Le sujet est d’une grande sensibilité, en Jordanie comme en Égypte. Une décision d’annexion viendrait fragiliser la relation d’Israël avec ses voisins. Les autorités jordaniennes ont formulé, au plus haut niveau, des mises en garde contre les risques qu’emporterait l’annexion sur la relation des deux pays. Le roi de Jordanie a évoqué la possibilité d’un « conflit massif ». L’accord de paix de Wadi Araba signé en 1994 avec Israël, comme le traité de paix israélo-égyptien de 1979, reposent sur la perspective de la création d’un État palestinien souverain et indépendant. Même si cette perspective est, jusqu’à présent, restée théorique, y mettre un terme, par l’annexion, fragiliserait l’équilibre de ces accords et fragiliserait aussi, et renforcerait aussi une perception particulièrement forte des populations concernées.

Une décision d’annexion pourrait également provoquer des réactions déstabilisatrices dans les camps de réfugiés palestiniens, en particulier en Jordanie mais aussi au Liban.

J’ajoute qu’une telle décision ne manquerait pas d’être instrumentalisée par les groupes terroristes, dans les territoires palestiniens et au-delà dans la région. Elle aurait aussi un effet d’aubaine, un effet « d’aubaine politique », pour les États les plus hostiles à Israël, en nourrissant par exemple la rhétorique anti-israélienne de l’Iran, au détriment des voix modérées dans la région.

Ainsi, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, l’annexion ne serait, en somme, dans l’intérêt de personne : ni dans celui des Palestiniens, - j’ai évoqué l’ensemble des conséquences - ; ni dans celui des Israéliens, dont la sécurité passera, à terme, par un accord avec les Palestiniens et par une pleine intégration régionale ; ni dans celui d’une région dont la stabilité est déjà menacée par les tensions et les conflits ; ni dans celui des Européens et de la communauté internationale, qui ont investi des efforts diplomatiques et financiers massifs dans la perspective des deux États.

Pour toutes ces raisons, à quelques jours de l’échéance du 1er juillet, la France est pleinement mobilisée.

À défaut de pouvoir relancer immédiatement des discussions de paix, notre objectif est de préserver les conditions d’une négociation future et la possibilité d’une solution négociée. Nous nous coordonnons avec nos partenaires européens et arabes pour envoyer des messages préventifs et des messages dissuasifs pour que l’annexion, je le redis, quel qu’en soit le périmètre, ne se produise pas. Et dans l’hypothèse où nos efforts n’aboutiraient pas, nous nous préparons à réagir. Et comme je l’ai dit à plusieurs reprises, je le redis ici, une décision d’une telle gravité ne peut rester sans réponse. Je ne vais pas décliner la totalité de la réponse, ou des réponses, puisque les réponses interviennent lorsque les actes sont posés, chacun l’a bien compris, et chacun n’attend pas autre chose. Mais il importe quand même d’essayer de clarifier :

Le premier axe de notre action est préventif.

Pour dissuader les Israéliens de procéder à tout acte unilatéral qui conduirait à l’annexion de territoires palestiniens, nous leur faisons passer des messages clairs, aussi bien publiquement qu’en privé, aussi bien à titre national qu’en coordination avec nos partenaires, notamment européens.

Nous faisons d’abord valoir les avantages que les Israéliens pourraient retirer d’une coopération accrue avec l’Union européenne s’ils renonçaient à l’annexion et s’ils s’engageaient dans un véritable processus politique négocié, sur la base du droit international et des paramètres agréés.

Dans cette configuration, on pourrait envisager, si c’était le cas, le rehaussement de nos relations bilatérales. Cela serait dans l’intérêt de tous.

Mais, à l’inverse, nous indiquons aux Israéliens que nous ne reconnaîtrons aucun changement aux lignes de juin 1967 qui ne serait pas agréé entre les parties, et donc nous ne reconnaîtrons pas la souveraineté israélienne sur les territoires annexés.

Tout cela, j’ai moi-même eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises depuis l’investiture du nouveau gouvernement israélien : je l’ai dit publiquement, et je l’ai dit aussi lors d’entretiens récents que j’ai eus avec mon homologue M. Ashkenazi.

Mais j’ai aussi, - je le dis à Mme Prunaud qui disait tout à l’heure que « la France n’est pas reconnue comme telle, comme acteur dans le processus de paix » -, quand je rencontre M. Al-Malki, mon collègue palestinien, il ne dit pas la même chose. Au contraire, à chaque entretien, y compris lors des entretiens que Mahmoud Abbas peut avoir avec le président Macron, il est répété régulièrement que les Palestiniens savent pouvoir compter sur nous, pour être à leurs côtés et agir en faveur d’une solution négociée. Mais, parallèlement à cela, nous continuons à assurer les Palestiniens de notre engagement en faveur de l’établissement d’un État palestinien souverain, viable, contiguë et démocratique. Et nous avons mobilisé des aides spécifiques par exemple dans le contexte de la COVID, nous avons débloqué de manière anticipée notre aide budgétaire annuelle de 16 millions d’euros pour permettre à l’Autorité palestinienne de fonctionner. Nous avons doublé, vous le savez, l’année der nière et maintenu cette année notre aide à l’UNRWA après le départ financier des États-Unis d’Amérique. Tout cela pour donner aux Palestiniens des raisons de ne pas se détourner du cadre d’Oslo, au moment même où ce cadre est remis en cause par Israël.

Et nous incitons aussi les Palestiniens à inscrire leur action dans le cadre d’un processus politique négocié. Il nous revient de les alerter sur le risque d’effritement progressif de l’Autorité palestinienne si elle venait à renoncer à ses propres prérogatives.

Le second axe de notre action est dissuasif : il s’agit de dire dès à présent que si les Israéliens décidaient d’aller de l’avant dans le processus d’annexion, nous serions contraints d’y opposer des mesures affectant les relations de l’Union européenne et de ses États membres avec Israël.

Les relations entre l’Union européenne et Israël sont régies par de nombreux accords, à commencer par l’accord d’association UE-Israël, mais aussi beaucoup d’accords de coopération. La participation d’Israël à différents programmes de coopération, en particulier pour la partie qui est en préparation dans le cadre financier pluriannuel 2021-2027, devra être réexaminée, à la lumière du contexte nouveau que créerait une annexion partielle de la Cisjordanie. Et cela devrait être le cas aussi en matière commerciale, pour veiller à renforcer le contrôle de l’origine des produits importés au sein de l’Union européenne.

C’est vrai, je l’ai entendu, que réunir un consensus au sein de l’Union européenne sur la question israélo-palestinienne est difficile. J’ai moi-même plusieurs fois appelé à l’unité sur ce sujet essentiel, notamment lors du Conseil des ministres des Affaires étrangères récent, le 15 mai dernier.

Mais, nous ne pouvons décider seuls de suspendre tel ou tel accord entre l’Union européenne et Israël. Pour autant, cela n’empêche pas une coordination étroite avec nos plus grands partenaires européens, l’Allemagne, Italie, l’Espagne, le Haut représentant Josep Borrell, ainsi que plusieurs États membres proches de nos vues, et je relève que même si quelques États européens se distinguent sur le sujet, je relève que la règle de l’unanimité ne s’applique pas à tous les programmes européens auxquels participe Israël.

Enfin, une série de mesure peuvent être prises à titre national, et de manière coordonnée avec nos principaux partenaires européens.

Il s’agit d’introduire dans tous les accords bilatéraux en discussion avec Israël des clauses territoriales, afin de matérialiser la distinction juridique, - c’est M. Collin qui rappelait ce problème tout à l’heure -, entre le territoire d’Israël et les territoires occupés. Cela ne signifie pas du tout que nous mettons fin à tous les accords qui nous lient avec Israël. Bien sûr, nous avons avec ce pays des intérêts communs, y compris en matière de sécurité dans la région. Il ne s’agit pas de suspendre cette coopération avec Israël, mais cela signifie de marquer clairement et systématiquement une distinction juridique qui traduit nos positions politiques.

Je précise aussi qu’il nous appartiendra de mettre en place, de manière systématique, des mesures de contrôle de la mise en oeuvre de l’étiquetage différencié des produits des colonies, qui est une obligation, désormais, au titre du droit à l’information du consommateur européen, confirmée cette année par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne.

Enfin, dans un même mouvement, nous nous coordonnons également avec nos partenaires arabes, à commencer par l’Égypte et la Jordanie.

Je l’ai dit : ces pays sont directement concernés par les conséquences d’une décision d’annexion. Cela induit des enjeux de sécurité, que M. Cazeau a bien évoqués tout à l’heure. J’observe d’ailleurs que le vice-Premier ministre Benny Gantz, ainsi que mon homologue M. Ashkenazi, sont tous deux anciens chefs d’Etat-major des Armées, qui connaissent l’importance du maintien des accords de paix d’Israël avec l’Égypte et la Jordanie. Et nous essayons de coordonner vis-à-vis d’eux nos messages avec ces partenaires arabes. Et à cet égard, nous avons établi, puisque je crois que l’un d’entre vous parlait tout à l’heure de la relation avec l’Allemagne, nous avons établi un format de concertation, avec nos homologues jordanien, égyptien et allemand. Nous nous réunissons pour coordonner nos actions, nos ripostes, en cas d’annexion.

Dans le même esprit, nous incitons l’Arabie saoudite, qui est à l’origine de l’Initiative de paix arabe de 2002, à se mobiliser. Nous avons relevé, comme vous, que les Émirats arabes unis ont récemment mis en garde contre une décision d’annexion. Je veux finir en disant qu’une éventuelle décision d’annexion ne modifierait en rien, au contraire, je dis « en rien, au contraire » -, notre détermination ancienne, à reconnaître, le moment venu, l’État palestinien, dans le cadre et le format appropriés, lorsque cette décision sera utile rapidement pour la paix.

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,

Faute de pouvoir relancer dans l’immédiat un processus politique crédible, nous avons la responsabilité de tout faire pour en préserver la possibilité dans le futur.

La situation est préoccupante, et nous en avons parfaitement conscience. C’est pourquoi nous agissons de manière déterminée et résolue - et non pas uniquement de manière déclaratoire - afin de préserver la solution des deux États dans le cadre du droit international, seul moyen de parvenir à la paix après des années et des années de conflictualité.

Merci de votre attention./.

Dernière modification, le 26/06/2020

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